Je ne pouvais pas commencer mes articles par un autre sujet que le retour des blogs !
Depuis quelques années, de plus en plus de personnes délaissent les réseaux sociaux, pour leur usage personnel ou professionnel. Si le nombre de comptes créés et d’utilisateurices actif-ves restent en hausse ou stables avec l’accès de plus en plus facile à internet partout dans le monde, on voit néanmoins une vraie tendance à se distancier des réseaux, ne serait-ce que le temps d’un week-end.
De nombreuses raisons peuvent expliquer cet exode numérique.
On peut d’abord citer les algorithmes très obscurs qui entrainent un reach* ridicule, et ne montrent les publications qu’à 5 à 10% de l’audience des créateurices.
La modération interne aux réseaux sociaux ne vaut pas mieux, puisqu’elle est soit inexistante, soit carrément contre-productive en supprimant les messages et comptes de personnes subissant la violence.
On pointe aussi souvent les changements incessants de modes et de types de contenus qu’il “faut” poster pour plaire (surtout aux algorithmes). Le rythme effréné de publication épuise autant les créateurices que leur audience. Dans la lignée des tendances “slow-life” IRL*, on voit apparaître depuis quelques années des propositions de “slow contenu”.
Dans une récente newsletter, Mélanie du blog Le cul de poule parlait de son sentiment de vivre dans une société où tout le monde veut et doit aller vite et disait : “Moi j’aime bien la brasse pépère, limite le dos crawlé quand tu ne sais pas trop où tu vas en travers du bassin. Mais depuis des mois je suis coincée dans un banc de professionnels de la nage papillon, je me prends des tartes dans la figure à chaque longueur et ce n’est pas très facile de garder la tête hors de l’eau.”
Cette métaphore me plait et me parle beaucoup. D’autant plus que depuis quelques temps, mon corps ne me permet plus de pratiquer la nage papillon (pas que j’aie jamais su la nager, mais je file la métaphore).
Alors j’ai décidé de trouver la vitesse de nage qui me convient, sur l’aspect personnel et professionnel, mais aussi en ligne. Et selon moi, ça passe par un retour à une production/consommation numériques plus raisonnées.
Enfin, ou peut-être surtout, il devient urgent de nous réapproprier nos données, dans un monde où tout se monétise. Instagram gagne des millions grâce aux publications de créateurices qui ne touchent absolument rien en retour. Twitter peut subitement supprimer définitivement votre compte si un de vos tweets est jugé hors charte. YouTube démonétise régulièrement les vidéos qui ne seraient pas assez consensuelles pour les annonceurs*.
Les nombreux scandales sur l’utilisation et la revente de nos données personnelles faites par les GAFAM* ont également entaché la confiance qu’on leur apporte au moment de liker une page ou de poster une photo. A l’heure où les Etats-Unis détricotent le droit à l’avortement, notre utilisation du numérique pourrait bien se retourner contre nous. Lucie Ronfaut l’explique très bien dans sa newsletter du 29 juin.
Autant de raisons d’avoir des espaces en ligne qui ne dépendent pas des intérêts capitalistes et qui nous appartiennent. Sur mon blog, je pourrai écrire ce que je veux sans risquer d’être suspendue par Twitter. Si je reçois des messages haineux, je pourrai bannir définitivement les harceleurs sans dépendre d’une modération aléatoire. Si le groupe Meta décide de fermer Instagram du jour au lendemain, mon contenu restera en ligne sur mon site.
Voilà, c’étaient mes quelques billes personnelles sur nos relations ambivalentes aux internets. J’espère que ça vous donnera envie de lire mes futurs articles !
A plus,
Jill
Quelques ressources
Le compte Instagram de Mélanie Lily et ses articles sur la “détox digitale”
Le blog “La Révolution des Tortues” qui parle de quitter les réseaux sociaux
L’article de Mélissa Andrianasolo sur les annonces de dates de sortie
L’article « Pourquoi des militants quittent Instagram » sur Numerama
Début 2021, Twitter et Instagram ont quasi-systématiquement supprimé les posts posant la question « Comment fait-on pour que les hommes cessent de violer ? » alors que les appels au viol pullulent sur ces réseaux
Lexique
Annonceur : En marketing, on appelle l’entreprise ou marque à l’origine d’une campagne de pub un annonceur.
GAFAM : Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft, les 5 grandes firmes américaines qui dominent le numérique et internet. Elles sont représentatives de la puissance que peuvent avoir des entreprises face aux utilisateurices et aux États.
IRL : In real life, par opposition à ce qu’on fait en ligne
Reach : Terme marketing qui évoque le nombre de personnes ayant été exposées à une publicité ou un post sur internet.